La leçon à tirer de la sanction disciplinaire infligée à un médecin nutritionniste

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Dossier Sanctions

Le Docteur J.-M. C. ne pourra pas exercer la médecine pendant un an, a confirmé le Conseil d’Etat dans un arrêt du 15 mars 2017 (n°395398). Le médecin avait été condamné en novembre 2015 par la Chambre disciplinaire Nationale de l’Ordre des médecins (sur plainte de son Conseil National) à deux ans d’interdiction d’exercice de la médecine, dont un an avec sursis du fait du caractère publicitaire de sa collaboration avec le site Internet « Savoir maigrir ». Ce site dispense des conseils nutritionnels personnalisés destinés à favoriser la perte de poids, moyennant la souscription d’abonnements payants.

La Chambre disciplinaire Nationale de l’Ordre des médecins avait jugé que le site « Savoir maigrir » présentait un caractère publicitaire par la manière dont il vantait les mérites de ses recommandations nutritionnelles, et que le Docteur C., en photo sur le site et présenté comme « votre expert en nutrition », retirait un avantage financier de cette collaboration.

Or, l’article R.4127-13 du Code de la santé publique dispose que lorsqu’un médecin « participe à une action d’information du public de caractère éducatif et sanitaire quel qu’en soit le moyen de diffusion, il doit (…) se garder à cette occasion de toute attitude publicitaire, soit personnelle, soit en faveur des organismes où il exerce où auxquels il prête son concours, soit en faveur d’une cause qui ne soit pas d’intérêt général », de même que selon l’article R.4127-19 du même code « la médecine ne doit pas être pratiquée comme un commerce. Sont interdits tous procédés directs ou indirects de publicité et notamment tout aménagement ou signalisation donnant aux locaux une apparence commerciale ».

Ce médecin, auteur de nombreux livres sur les régimes et l’alimentation et fréquemment invité dans les médias, avait formé un pourvoi contre cette sanction, pourvoi que le Conseil d’Etat a donc rejeté, estimant que la Chambre disciplinaire Nationale de l’Ordre des médecins n’avait « ni commis d’erreur de droit ni dénaturé les faits dont elle était saisie ».

En outre, le Conseil d’Etat a considéré qu’il n’y avait pas d’atteinte à la liberté d’expression du médecin : « qu’en prohibant le recours à des procédés publicitaires par les médecins, les règles déontologiques citées (…) poursuivent un objectif d’intérêt général de bonne information des patients et, par suite, de protection de la santé publique ; que M. A… n’est, dès lors, pas fondé à soutenir que la sanction infligée par la décision attaquée porterait à sa liberté d’expression une atteinte excédant les limites que ces finalités d’intérêt général justifient d’y apporter ; que le moyen tiré de ce que cette décision aurait méconnu les stipulations de l’article 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales doit, ainsi, en tout état de cause, être écarté » ;

Le Docteur C. est également condamné à verser 2.000 Euros au Conseil national de l’Ordre des médecins au titre des frais engagés par celui-ci.

Arguant d’un « flou juridique » concernant l’usage d’Internet par les médecins, le Docteur C. a annoncé son intention « de contester cette décision devant la Cour européenne des droits de l’homme » mais il n’en demeure pas moins que sa sanction est à présent définitive puisque les voies de recours sont épuisées en France.

Les chirurgiens-dentistes sont concernés par une telle décision car les règles déontologiques qui leur sont applicables sont les mêmes que celles des médecins (voir articles R.4127-215 et 225 du code de la santé publique) et prohibent tous procédés directs ou indirects de publicité ainsi que toute réclame pour une firme quelconque.

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Les chirurgiens-dentistes doivent donc éviter par exemple d’apparaitre comme « expert » sur un site internet assurant la promotion auprès du grand public d’un produit ou d’un service de médicale ou paramédicale (il n’en est pas de même si le site est destiné aux Confrères chirurgiens-dentistes car dans ce cas l’éventuelle publicité qui en résulte ne peut être sanctionnée selon un arrêt du Conseil d’Etat n°88724 du 6 mai 1988).

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